Depuis 2015, le Burundi traverse une crise politique grave qui a impacté très négativement la situation des droits humains. Plusieurs milliers de personnes ont été tuées, disparues, des centaines de femmes et filles ont été violées, tandis que d’autres croupissent injustement en prison alors que des centaines de milliers ont été contraintes de fuir le pays, et trouver asile dans la sous-région et d’autres pays.
Les différents mécanismes internationaux de protection des droits humains ont formulé, tour à tour et en vain, des appels au gouvernement burundais à protéger ses propres citoyens contre les atteintes à leurs droits.
Plusieurs organes de traités des NU ont dénoncé, chacun dans leur sphère spécifique, les violations des droits et obligations perpétrées et formulé des recommandations demandant au pays de s’engager pour le respect des droits et libertés des citoyens.
Au lieu de fournir des réponses aux questions posées et se conformer aux recommandations des organes de traité, le gouvernement du Burundi s’empresse chaque fois à prendre des mesures de représailles envers les organisations et/ou individus ayant collaboré avec ces instances et à abandonner les examens, comme ce fut le cas lorsque le Comité contre la torture exigea un examen spécial de la situation au Burundi en juillet 2016.
A cette occasion, le régime de Bujumbura s’est vengé contre les organisations burundaises en radiant quatre juristes activistes burundais de l’Ordre des avocats. Cette mesure a été suivie par une saisie généralisée des biens de plusieurs autres activistes des droits humains, tous étant accusés sans fondement d’être de mèche avec les militaires putschistes du 13 Mai 2015.
Les menaces envers les personnes ayant participé à l’examen du Burundi ont été dénoncées par les Nations Unies, et constituent une violation claire à la Convention qui prévoit la protection des plaignants et des témoins contre « tout mauvais traitement ou toute intimidation suite à une plainte ou un témoignage »
C’est cette même politique de l’autruche que le gouvernement joue avec la décision d’interdire l’accès au Burundi à la Commission d’enquête diligentée par le Conseil des Droits de l’Homme et de déclarer persona non grata les commissaires de ladite commission.
Le retrait unilatéral du statut de Rome alors même que la Cour pénale internationale venait d’entamer des enquêtes préliminaires sur les crimes liés à l’opposition populaire au 3ème mandat du Président actuel s’est ajouté au panier des manœuvre visant à soustraire progressivement le Burundi à ses obligations internationales.
Même si ce dernier reste sujet aux vétos des grandes puissances, les organes de traité sont en mesure de discerner les situations qui requièrent une intervention urgente de la communauté internationale.
Les réactions des organes de traités et autres instances onusiennes n’ont malheureusement pas arrêté la machine répressive, mais elles ont révélé la capacité d’un régime répressif comme le Burundi à s’en prendre aux activistes par tous les moyens, illustrant par le même le besoin d’une réponse systémique et forte des instances onusiennes. Au Burundi, presque tous les activistes engagés dans les instances onusiennes de droits humains ces dernières années ont été forcés à prendre le chemin de l’exil et presque toutes les organisations de défense des droits humains indépendantes ont été radiées, leurs comptes bancaires gelés sans oublier la fermeture du bureau du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme.
Les violations des obligations internationales et constitutionnelles par le Burundi appelle à une réponse forte de la communauté internationale, et plus particulièrement des instances onusiennes. L’examen spécial du Burundi par le Comité contre la torture et la création d’une Commission d’enquête par le Conseil des Droits de l’Homme sont censés apporter des réponses, mais jusqu’ici les victimes continuent à demander justice, et la répression reste généralisée.
Partant de cet amer constant, il est nécessaire que les situations de violations systématiques et répétées des Conventions internationales, et la commission avérée de crimes contre l’humanité puissent être référées directement par les organes de traités aux instances les plus hautes, c’est-à-dire au Conseil de sécurité. Même si ce dernier reste sujet aux vétos des grandes puissances, les organes de traité sont en mesure de discerner les situations qui requièrent une intervention urgente de la communauté internationale, puisqu’ils reçoivent et analysent les rapports détaillés faisant état des violations, dont certains sont totalement confidentiels vu la nature de leur contenu.
En référant directement des situations de violations graves et avérées des traités internationaux au Conseil de sécurité ou au Conseil des droits de l’Homme, les organes de traité démontreraient que leur pertinence et capacité d’agir ne se limitent pas à un cycle d’examen périodique, mais qu’ils sont aussi capables de réagir lorsque la situation le requière.